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25 - 10 - 2017

Animaux & guerres, épisode 19 : Le lapin et le lièvre

Le Capitaine dînera, lithographie d’après Louis Albert Guislain Bacler d’Albe, (1761-1824), planche 77 du tome 1 Souvenirs pittoresques du général Bacler d’Albe, Paris, Engelmann, 2 vol., 1819-1822, Est C5 © Paris, musée de l’Armée, Dist. RMN-GP / Émilie Cambier

Cette estampe montre un soldat tenant un lièvre à la main. Sur la gauche, des soldats se reposent sous un abri tandis qu’à l’arrière-plan, d’autres militaires chassent le lièvre. Cette image illustre un des aspects de la vie des soldats en campagne, celui du bivouac. En campagne, l’approvisionnement en vivres est parfois incertain et, pour améliorer leur quotidien, les soldats pratiquent la maraude dans les villages situés à proximité du campement.

En-tête du journal de tranchée Le Lapin à plumes. À la fin de l’année 1914, la guerre de position s’installe et les soldats creusent des tranchées dans lesquelles il vivent et combattent. Pour échapper à leur difficile quotidien, ils rédigent et illustrent des gazettes appelées journaux de tranchées. Le Lapin à plumes constitue le supplément illustré au Canard Poilu, « journal du front, hebdomadaire, torsif et antiboche », organe officiel des poilus du 15e corps. 32 numéros sont publiés entre octobre 1914 et mai 1916. Chaque en-tête est due à l’illustrateur Marcel Jeanjean (1893-1973) et montre les combattants, transformés en lapins, occupés à différentes activités : combattant dans les tranchées (n°1 et 5), en train de cuisiner (n°8), à l’assaut (n°11),  communiquant au téléphone (n°19) ou encore à l’infirmerie (n°20). Qu’ils soient français ou allemands, tous les soldats prennent la forme d’un lapin, comme le montre le n°17, représentant des lapins prisonniers allemands.  D’autres animaux vivants dans des terriers ou creusant la terre, comme la taupe, le blaireau, sont également utilisés pour désigner ou représenter le soldat dans les tranchées. © Paris, musée de l’Armée

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Martial Peyrichou, Le Kronprinz. Tambour des lapins de la Garde, carte postale, 1914. Le Kronprinz, fils de Guillaume II, est ici caricaturé sous la forme d’un lièvre portant le casque à pointe. La légende, Le Kronprinz, tambour major des Lapins de la Garde fait probablement allusion à sa formation militaire qui, selon la tradition des princes prussiens, débute dans le 1er régiment d’infanterie de la Garde. Pendant la Première Guerre mondiale, le Kronprinz prend le commandement de la Ve armée. Il se distingue surtout par sa frivolité, si bien que la presse britannique le surnomme Clown Prince. La presse satirique française reprend cette image notamment à la une de La Baïonnette du 22 juillet 1915, montrant le Kronprinz chevauchant un lapin blanc nommé Clownprinz. Faut-il voir dans ce dessin une allusion à l’un des traits de caractère du lièvre, naturellement craintif, qui détale au moindre bruit inconnu ? © Paris, musée de l’Armée

Le lapin et le lièvre

« Comment ! des animaux qui tremblent devant moi !
Je suis donc un foudre de guerre ? »
Jean de La Fontaine Le lièvre et les Grenouilles

Cunicularii

Les Romains utilisent l’image du lapin et désignent les sapeurs et mineurs du nom de munitores, fossores, fodientes ou encore cunicularii. Le terme cuniculus, ou lapin, désigne la galerie souterraine creusée par les mineurs pour les approches souterraines lors des sièges.

Plus tard, dans ses Chroniques, Jean Froissart relate un épisode de la guerre de Cent Ans : une bataille opposant le roi Philippe VI de Valois au roi d’Angleterre Édouard à Buironfosse en 1339. Avant la bataille, il est décidé de nommer de nouveaux chevaliers. Au moment où les deux armées se font face, un lièvre étant venu semer la panique, le combat n’a finalement pas lieu. Les chevaliers consacrés alors ont été surnommés « chevaliers du lièvre ».

Peau de lapin

Les poils de lapins permettent de réaliser des vêtements chauds et imperméables. Ainsi la fourrure de lapin est utilisée pour confectionner des manteaux. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une journaliste du Chicago Tribune, Sigrid Schultz (1893-1980), fait la découverte, dans la villa d’Heinrich Himmler (1900-1945), d’un album de photographies relatives au « Projet Angora ». Il s’agit d’un programme initié en 1941 par Himmler, visant à élever des lapins de race angora, prévoyant des soins vétérinaires particuliers et une nourriture contrôlée, pour produire de la laine destinée à la fabrication des uniformes de l’armée – pulls, chaussettes, caleçons. À cet effet, des sections spéciales d’éleveurs de lapins sont formées, les Reichsfachgruppen Kaninchenzüchter. En 1943, le Projet Angora réunit environ 65 000 lapins, élevés dans les camps de concentration, et produisant 5 tonnes de laine. L’album intitulé Angora Rabbit Raising in Nazi Concentration Camps est conservé aujourd’hui à la Wisconsin Historical Society à Madison.

Des lapins aux Invalides

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Georges Morin, fonctionnaire à l’Office national des Anciens combattants (ONAC) vit avec sa femme Denise et sa fille Yvette, aux Invalides. Engagée dans le réseau de Résistance Action Vengeance de la France Combattante en 1940, cette famille cache aux Invalides des aviateurs anglais, américains et canadiens, entre 1942 et 1944, avant de les faire transférer avec de faux papiers vers l’Espagne ou l’Angleterre. Les aviateurs de passage surnomment Denise Morin, Mammy Rabbit car elle élève des lapins pour les nourrir. La famille Morin est arrêtée par la Gestapo le 5 juillet 1944 et déportée. Une plaque commémorative mentionnant l’action de Georges est visible aux Invalides.

Les visiteurs peuvent aujourd’hui encore, remarquer la présence de nombreux lapins de garenne du côté de la façade nord.

 

Deux lapins sur l’esplanade des Invalides. © Paris, musée de l’Armée

Deux lapins sur l’esplanade des Invalides. © Paris, musée de l’Armée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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