En attendant de pouvoir découvrir un campement grandeur nature le 18 mai à l’occasion de la Nuit des musées, retrouvez chaque jour sur ce blog un épisode de notre feuilleton pour découvrir la vie quotidienne d’un campement de soldats de la Grande Armée.
« Les grenadiers me firent l’honneur de manger la soupe avec eux et me montrèrent la manière honnête à observer. On est debout autour de la gamelle qui est ordinairement de huit hommes. On prend à tour de rôle une cuillère de soupe en faisant un pas en avant et ensuite un pas en arrière et le haut du corps en avant pour ne pas salir les vêtements »
Mémoires inédits d’un prisonnier en Russie par le Suisse Pierre-Louis Mayer
« Nous étions toujours au régime de la viande de cheval. N’ayant plus de sel, un de nos camarades, chargé du pot-bouillie, eut l’idée de le remplacer par deux ou trois cartouches : le salpêtre de la poudre devant tenir lieu de sel. Je ne goûtai point ce nouveau genre d’assaisonnement. Le bouillon était comme du cirage, et j’eus beau gratter la viande pour enlever la couche de noir, il me fut impossible de l’avaler. Je fus forcé de manger mon pain sec. En faisant une tournée dans le camp, nous parvînmes à nous procurer presque la moitié d’une cuisse de cheval qui avait une mine charmante, on la mangeait des yeux et avec cela, ce qui était aussi précieux, une bonne poignée de sel. Nous voilà de nouveau à mettre notre arrosoir au feu, avec beaucoup de viande et peu d’eau pour que ce fût vite cuit. Mais il fallut rester plusieurs en faction autour de la marmite, sans quoi elle nous aurait été volée ».
Extrait de Mes campagnes sous la Révolution et l’Empire par Philippe-René Girault
Le Règlement impose une certaine manière de faire la soupe qui est le plus souvent composée de choux, d’oignons, de pain et parfois d’un morceau de viande :
- Remplir la marmite d’eau. Prévoir un litre pour chaque quart de kilogramme de viande,
- Faire bouillir à grand feu pour l’écumer promptement,
- Mettre huit grammes de sel par litre d’eau,
- Ajouter les légumes une ou deux heures avant que de retirer la viande,
- Laisser bouillir cinq ou six heures,
- Tremper le pain,
- Laisser la marmite sur le feu jusqu’à la dernière gamelle, afin que le bouillon ne perde pas sa chaleur.
Ces témoignages demeurent exceptionnels. La plupart du temps, le soldat ne mange pas à sa faim lors des campagnes militaires. L’approvisionnement ne parvient que très difficilement jusqu’à la troupe. Tractés par des chevaux qui peinent à avancer sur des routes en mauvais état, les caissons d’approvisionnement ne parviennent pas à suivre les cadences de marche des fantassins.
Quelques mots et expressions populaires de l’époque :
- Bouilli : soupe grasse mijotée dans une cuirasse assaisonnée à la poudre noire de canon
- Breloque : sonnerie de rassemblement des soldats chargés de recevoir les vivres au son des tambours
- Frippe-sauce : soldat gourmand
- Fristouille : surnom donné à l’ordinaire
- Mouillante : soupe du soldat
- Pain de munition : pain du soldat censé ne pas moisir rapidement car composé de froment, de seigle et de farine dont les grains n’ont pas été nettoyés.
Albrecht Adam, A Kalvary, le 24 juin 1812 © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Pascal Segrette
1 commentaire
23 octobre 2021 à 11h07
SophieR |
Merci beaucoup pour ces informations sur l'armée de Napoléon, ultra intéressant car justement je me demandais de quoi était fait le pain de munition et s'il était vrai qu'on mangeait de la poudre de canon, je vais voir si l'on peut s'abonner à vos articles, merci.