« Je me rappelai l’armée rangée en bataille, le lendemain, à sept heures du matin, s’ébranlant simultanément : l’infanterie l’arme au bras, marchant en colonnes échelonnées par régiment, contre des lignes doubles d’une étendue incommensurable ; se déployant et, après quelques bons feux à courte distance, les enlevant au pas de charge, les baïonnettes croisées, et la cavalerie chargeant à fond les nombreux escadrons russes, dispersant ou sabrant des colonnes d’infanterie moscovites, noires de profondeur, ou leur faisant poser les armes. Je me rappelai le corps d’armée du maréchal Soult, dont j’avais l’honneur de faire partie, partant du ravin de Kobelnitz, enlevant le vaste plateau de Pratzen, centre d’opérations de l’armée austro-russe, où commandaient le feld-maréchal Koutouzov et l’empereur Alexandre, rejetant le centre de l’armée ennemie sur Wisschau en lui enlevant ses canons ; et de ce point, par une savante demi-conversion à droite, combinant ses mouvements avec ceux des divisions Bourcier et Friand, du corps du maréchal Davout, et prenant à revers l’aile gauche de l’armée ennemie, commandée par les généraux Buxhowden et Langeron, l’acculant aux lacs de Telnitz et de Sokolnitz, où tout son matériel et beaucoup de Russes furent engloutis ».
Extrait des Souvenirs de ma vie militaire (1792-1822) par Jean-Stanislas Vivien à propos de la bataille d’Austerlitz
« Nos troupes redoublaient d’efforts, sans gagner du terrain. Le feu était encore plus vif ; on était aux prises sur tous les points. C’est dans ce moment que mon frère, ayant mis en mouvement deux de ses divisions appuyées de deux bataillons d’infanterie, se mit à la tête du 5e de cuirassiers pour enlever les troupes qu’il dirigeait sur la grande redoute et décider le succès de cette attaque, déjà tentée vainement plusieurs fois. Il en chassa l’ennemi, et, dès ce moment, la bataille fut gagnée, comme le dit l’Empereur, car l’ennemi se mit dès lors partout en retraite. »
Extrait des Mémoires du général Caulaincourt, grand écuyer de Napoléon à propos de la bataille de la Moskowa
La bataille constitue le point culminant des campagnes militaires, le moment que les soldats redoutent le plus. Ils y risquent leur vie. Debout en rase campagne, le plus souvent sans protections ni retranchements, ils avancent au contact de l’adversaire en formant des lignes ou des colonnes d’attaques organisées en rangs serrés. Arrivés à quelques dizaines de mètres de l’ennemi, ils tirent avec leurs fusils, avant d’engager le corps à corps à l’aide de leurs baïonnettes.
Napoléon est présent sur le champ de bataille et donne ses ordres. Le plus souvent, il a minutieusement préparé l’affrontement et dispose de plusieurs plans d’action qu’il fait évoluer en fonction des manœuvres de ses adversaires. C’est le fameux « coup d’œil », grâce auquel il saisit le moment opportun pour créer « l’événement » qui emportera la décision. Envoyer un corps d’armée sur le flanc adverse. Former une grande batterie d’artillerie. Lancer à l’assaut une colonne massive. Faire donner la cavalerie. Napoléon utilise tout le spectre des moyens à sa disposition et sait abuser l’adversaire par des diversions. L’une des constantes de sa stratégie est qu’il cherche à surprendre l’ennemi, comme lors de l’attaque du corps de Soult sur le plateau de Pratzen, à Austerlitz, ou de la charge de la cavalerie lourde contre les redoutes fortifiées à la Moskowa.
Quelques mots et expressions populaires de l’époque :
- Avoir des engelures aux yeux : soldat effrayé et qui a peur de se battre
- Avoir du sang aux ongles : faire preuve de bravoure et de vaillance
- Bien ficelé : soldat prêt à se battre
- Déchirer de la mousseline : désigne la fusillade quand tous les coups de fusil partent en même temps
- Déjeuner à la fourchette : se battre à la baïonnette
- Donner un sacré coup de peigne : attaquer l’ennemi avec virulence
- Escoffier : tuer un ennemi
- Défiler la parade ou être chez le père éternel ou être chargé d’une commission pour l’autre monde : être tué pendant la bataille
- Ouvrir le bal ou aller à la noce : partir à la guerre
- Tâter l’ennemi : combattre
- Tourner de l’œil : être blessé au combat
Shako du colonel de Marbot, fendu par un coup de sabre en Espagne en 1811 © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Chavan
Cuirasse du carabinier Fauveau © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Emilie Cambier
Antoine-Jean Gros, Le général de Lariboisière faisant ses adieux à son fils © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / image musée de l’Armée
Jean-Charles Langlois, Esquisse ou maquette du panorama de la bataille de la Moskowa, le 7 septembre 1812 © Paris – Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Christian Moutarde
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